Réussir un "portrait" de notre ami est la plupart du temps le fruit d'une heureuse conjonction entre des multiples soirées d'observation et un trajet qui amène - souvent par chance pour le photographe - le blaireau en toute proximité ou dans un rayon d'action où le téléobjectif apporte un rapprochement virtuel suffisant.
Ce n'est pas le cas ici, le hasard n'y a pas sa place : ce portrait a en effet été dûment préparé ! Je fais très rarement ce choix car je minimise les risques de dérangement. Aussi est-ce important de rendre explicite l'envers du décor ! Sans prétention aucune mais avec mon expérience, je déconseille ce type de prise de vue aux débutants en photographie ou en blaireaulogie !
Réussir un portrait de blaireau : le "making of" technique…- attente pour pouvoir choisir une journée de grand beau temps avec un vent de secteur tout à fait stable dans la durée ce qui est fort rare (utilisation d'une application météo locale fiable à croiser-vérifier avec la configuration précise du lieu, je recours à l'observation du trajet in situ de bulles de savon)
- détermination d'un secteur suffisamment dégagé au niveau de la végétation basse et actuellement régulièrement fréquenté par les blaireaux (recours au piégeage vidéo ou aux observations directes régulières)
- positionnement du photographe en affût fixe dans une zone (lisière) où le blaireau ne se rend généralement pas du fait qu'elle est trop exposée à la lumière (le blaireau utilise presque toujours le même trajet à l'endroit précis des prises de vue présentées ici)
- installation derrière un tronc en extrême proximité de l'entrée (environ 7 mètres), simple ajout d'une légère toile de camouflage pour fondre le pourtour de la lentille frontale de l'objectif et la tête du photographe dans l'environnement "dépassant" du tronc mais positionnée tout contre pour limiter l'effet de "silhouette inhabituelle" repérable par le blaireau, particulièrement lors de son émergence. Pour évaluer l'effet silhouette penser à regarder et considérer aussi tout ce qui se trouve derrière le photographe, même assez loin.
- recours à une focale de 500mm adaptée au rapport d'agrandissement attendu à la distance du sujet (si les lieux l'avaient permis je me serais positionné bien plus loin et aurais choisi une plus longue focale)
- ajout d'une surcouche d'éléments d'insonorisation autour du boîtier en plus de la housse rembourrée habituelle
- arrivée ultra-discrète deux heures avant la sortie attendue
- au fil de la soirée, pré-réglages adaptés en continu et pré-positionnement calé sur trépied pile sur le cadrage de l'endroit voulu
- oeil du photographe rivé sur le viseur en anticipant la plage horaire (souvent très réduite) de la sortie ou dès ses premiers signes
- paramètres techniques : Nikon D5, trépied Gitzo, AF-S VR Nikkor 500mm f/4G ED, f4, -0,33ev, 1/100e recherché et obtenu, mode auto iso (série oscillant entre ISO 16 000 et ISO 25 600), VR On (attention au bruit du ronronnement de certains VR), AFC 9 pts, mode Quiet
Je ne juge pas toutes les images ici proposées comme étant de qualité égale mais présente tout de même plusieurs de mes clichés pris entre 20h52 et 20h59 pour d'une part attester que le blaireau n'a pas été dérangé lors de ce moment (sinon il serait retourné illico au sous-sol voire ne serait pas sorti) et qu'il a bien rejoint la surface sans me repérer ! Ces derniers points apportent un "plus" à ces clichés ! La vraie valeur d'une image animalière (souvent isolée) ne se réduit pas à ce que l'on y voit !
Et le "making of" poétique à la manière de Jacques Prévert…Pour faire le portrait
d’un blaireau
Peindre pour débuter un crépuscule d’été.
Dessiner ensuite un sous-bois dans le secret d’une forêt.
Cacher en bas de pente un terrier ombragé…
Agrémenter la terre devant la tanière.
Choisir par exemple quelque chose de vert :
Représenter une fougère ou un peu de lierre…
Illustrer la litière que son hôte transporte.
Ajouter ainsi quelques feuilles mortes.
Prier à la fin du jour pour que l’animal sorte !
Tracer lentement les contours de la patience.
Estomper les couleurs du silence.
Rêver d’un rendez-vous avec la chance…
Ne jamais paraître à découvert.
Se placer à vent contraire.
Faire de chaque nuit un sanctuaire.
Profiter des soirées sans lune.
Miser sur la bonne fortune !
Espérer la sortie opportune…
Si le blaireau émerge lentement,
Savourer alors de ce moment…
Si le blaireau émerge lentement,
Surtout partager cet instant ! Image n°784
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